La vie, c’est du cinéma, autant que le cinéma, c’est la vie.
Gilles Carle
Cher Gilles Carle qui êtes maintenant aux cieux, que votre œuvre foutraque parce que terrestre soit glorifiée à sa juste valeur !
J’émets des vœux pour que le ciné-paradis où vous flottez en maître soit un foutoir de jugement dernier où les débiles côtoient les putes, les saintes masturbent les vieillards, les anges servent la soupe aux proxénètes et les plus belles femmes du monde avancent toutes nues sur des nuages de neige avec des cornes d’orignal sur la tête.
Federico Fellini certifiait que l’Antiquité hante à jamais l’Italie, qu’il suffit de gratter le vernis de sa civilisation pour découvrir un univers archaïque, barbare et païen. Vous, cher Gilles Carle, déclariez que le Québec a toujours de la boue dans le cerveau et des épines de sapin collées à l’âme. Voilà pourquoi votre filmographie cède à toutes les démangeaisons, ne cesse de bondir dans tous les sens, épouse toutes les allées et venues des évolutions et révolutions.
Comme La vraie Nature de Bernadette où Micheline Lanctôt, petite-bourgeoise, quitte la ville pour la campagne. Lave son linge sale dans la rivière, s’adonne au régime végétarien et à l’amour libre. Comme La Mort d’un bûcheron où déboule Carole Laure, une rurale dans la jungle montréalaise qui pervertit au passage Maria Chapdelaine, le mythe de Louis Hémon, sous fond de déforestation.
Les mâles, les femelles, les Rouges, les Blancs, les ouvriers, les patrons, les nantis, les paumés, vous avez plongé toutes les figures inoubliables de votre monde dans une même mare de sperme, de sang, de rires, de larmes et de sueur. À l’image du pays dont vous êtes le plus grand cinéaste à ce jour. Ce Québec écartelé entre américanisme et franchouillardise qui n’en finit pas de courir après son identité, et n’arrive jamais à se poser.
Comme votre œuvre, cher Gilles Carle, un western à la Fellini, capoté, désenchanté, déboussolé, bordélique, libre !
En haut, Carole Laure dans La Mort d’un bûcheron
Ci-dessus, Micheline Lanctôt dans La vraie nature de Bernadette
Gilles Carle s’est éteint le 28 novembre 2009. Parkinsonien, il ne parlait plus depuis cinq ans. En hommage à cet artiste majeur québécois, des funérailles nationales ont été célébrées à la basilique Notre-Dame de Montréal. Quelques dates phare de sa filmographie :
1965 La Vie heureuse de Leopold Z
1968 Le Viol d’une jeune fille douce
1971 Les Mâles
1972 La vraie nature de Bernadette
1973 La Mort d’un bûcheron révèle Carole Laure, l’égérie et la compagne de Gilles Carle pendant 10 ans. Parmi leurs collaborations : La Tête de Normande Saint-Onge (1975), L’Ange et la femme (1977), Fantastica (1980), Maria Chapdelaine (1983)…
1981 Les Plouffe
1986 Rencontre avec Chloé Sainte-Marie, sa dernière égérie et compagne. Ils tournent La Guêpe, La Postière (1992) et Pudding chômeur (1994).
1989 50 ans, sur le parcours de l’ONF. Palme d’Or du Meilleur court métrage au Festival de Cannes.
Ce texte est sur Ecran Noir
Moi, j’me fais mon cinéma
4 Ils ont dit
Εxcеllent агticle.
Јe ѵiѕite сe sitе ѕouvent еt ϳе suis ѕubjugué
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Merci d’avoir Penser à honorer ce foubraque de génie..Bien des blogueurs québécois, j’en suis convaincu,ne s’y ont même pas donné la peine. Je vais vous lire, désormais.
Merci Benoit
Carole Laure
Très belles fêtes à toi, Benoit !
A bientôt pour le déjeuner de funérailles de PlayBac Biographies – puisqu’elles nous ont été officiellement annoncées.
On t’embrasse,
Hélène et Nicolas