Un mètre quatre-vingt-dix et de longues jambes. Mon Père était plus grand, plus fort et doté d’une plus belle voix que quiconque. Il avait les cheveux poivre et sel, le nez cassé de boxeur et une dégaine spectaculaire.

Anjelica Huston à propos de son père John

affiche_anglica_houston]Dans ses mémoires, gros pavé de quelque 600 pages, Anjelica Huston raconte tout de sa vie depuis son enfance au manoir de Saint-Clerans en Irlande jusqu’à Hollywood en passant par le Swinging London de la fin des années soixante et du début des années soixante-dix, d’une carrière débutée dans le mannequinat et poursuivie au cinéma à la fois comme actrice et comme réalisatrice.

A travers sa vie fastueuse qui semble pendant longtemps n’être qu’une succession ininterrompue de fêtes et de bals où elle côtoie une flopée de personnalités toutes plus excentriques et atypiques les unes que les autres, c’est toute une époque qu’elle décrit, celle du sex, drugs and rock n’roll, une époque où il fallait toujours repousser les limites au risque de se perdre et d’en mourir. Le livre fourmille d’anecdotes souvent drôles, parfois d’une trivialité extrême et de noms de gens célèbres au point d’engendrer parfois une certaine lassitude. Anjelica Huston évoque avec honnêteté et franchise le monde du cinéma, un monde cruel où un critique n’hésite pas, commentant sa prestation dans Promenade avec l’amour et la mort réalisé par son père à écrire : « On a droit au jeu totalement fade et suprêmement inepte de la fille de John Huston, Anjelica, qui a le visage d’un gnou épuisé, la voix d’une raquette distendue, et une silhouette aux contours à peine discernables ». Des humiliations de ce genre, elle en vivra bien d’autres. Si sa vie a été facile à bien des égards, il n’empêche qu’elle a dû se battre pour s’affirmer professionnellement, et pouvoir se réjouir tardivement d’avoir obtenu le premier rôle d’Une rose pour Emily, un court métrage car elle avait été choisie uniquement pour ses compétences.

Anjelica Huston parle avec beaucoup de lucidité de ses amours, de son attirance « pour les cow-boys et les rock stars, les artistes et les rebelles. Des hommes sur qui on ne peut pas compter. Des types qui vous font poireauter près de votre téléphone… pas le genre d’hommes sympas et faciles à vivre auprès de qui on peut se détendre », parmi lesquels Bob Richardson photographe trash et schizophrène, Ryan O’Neal qui aimait bien lui donner quelques coups à l’occasion et bien évidemment Jack Nicholson dont elle partagea la vie pendant une quinzaine d’années avant de rencontrer le sculpteur Robert Graham qu’elle épousa et auprès de qui elle vécut une relation apaisée. Il faut dire qu’en affaire d’hommes, Anjelica Huston avait un modèle indépassable, son père le cinéaste John Huston, un homme hors-normes, aventurier, séducteur, dandy, esthète, un homme souvent absent, occupé à aimer ailleurs ou à tourner. Un homme dont elle parle avec infiniment de tendresse et une lucidité sans faille. Très émouvante également lorsqu’elle parle de sa mère, Ricky Soma qui abandonna son métier de danseuse pour épouser John Huston et lui donner deux enfants, une femme sensible qui mourut à 39 ans dans un accident de voiture.

Un livre passionnant malgré quelques longueurs et le portrait d’une femme d’exception.

Suivez mon regard de Anjelica Huston Éditions de l’Olivier

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